INTERVENTION de la section départementale de la FNEC-FP FO Savoie mercredi 21 octobre 2020 En défense de la mémoire de Samuel Paty, professeur assassiné

INTERVENTION de la section départementale de la FNEC-FP FO Savoie mercredi 21 octobre 2020
En défense de la mémoire de Samuel Paty, professeur assassiné

Nous sommes réunis aujourd’hui pour saluer l’un des nôtres, dévoué à son métier qui est d‘instruire et d’éveiller à l’esprit critique, c’est-à-dire de construire des êtres humains conscients, libres d’assurer leurs choix.

Posons-nous les bonnes questions et réaffirmons les fondements de l’École Républicaine…

Selon nos informations, le président de la république voudrait renforcer la laïcité protectrice de la ‘’liberté absolue de conscience’’ par le projet d’une loi future contre les séparatismes et son gouvernement réfléchirait à la mise en place d’une meilleure protection des enseignants. Or, concernant la défense de la laïcité et la protection des fonctionnaires (les enseignants sont des fonctionnaires), il existe déjà un arsenal juridique très important qu’il serait urgent de respecter ou, du moins, de faire appliquer en s’en donnant réellement les moyens, ce qui n’est hélas pas le cas aujourd’hui.

La loi sur la séparation des églises et de l’État du 9 décembre 1905 affirme, en son article 1er, que « La République assure la liberté de conscience (…) et garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions (…) de l’ordre public » et, en son article 2, que « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte ». Tout est dit et bien dit !

Mettre en œuvre totalement et inconditionnellement cette séparation, c’est bien cela qui nous évitera d’avoir à lutter contre les séparatismes de toute sorte, lesquels ne sont que les conséquences du non-respect de cette loi !

Nous sommes en droit de demander au ministère s’il a mis en œuvre la protection de notre collègue Samuel Paty, alors qu’il était clairement menacé et que sa hiérarchie rectorale le savait ? Pourquoi ne pas avoir immédiatement, au lendemain du 5 octobre 2020, utilisé les textes déjà existants, notamment l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 ? Ce texte indique : «Les fonctionnaires bénéficient, à l’occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d’une protection (…). La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l’occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté.»

Pourquoi laisser croire qu’il faudrait trouver aujourd’hui une « meilleure » protection des enseignants?

Serait-ce parce que les textes existants se réfèrent au statut de la Fonction Publique… que justement le gouvernement actuel veut supprimer en application de la loi de transformation de la Fonction Publique?

Sans les droits et la protection liés au statut de la Fonction Publique, les personnels sont exposés à l’arbitraire, aux rapports de force locaux, ils ne peuvent pas être en sécurité. Ils dépendent entièrement des autorités locales… et aussi des pressions locales.

Avec la FGF-FO, nous rappelons que le Statut général des fonctionnaires est le garant de la neutralité et de la laïcité dans la Fonction publique. Le gouvernement serait donc bien avisé de le respecter et d’accepter d’en améliorer les garanties, au lieu de chercher à le détruire pour promouvoir une fonction publique fondée sur le contrat. Cela passe par l’abrogation de la loi de Transformation de la Fonction publique. Cela passe par la défense des CHSCT ; la FNEC FP-FO des Yvelines a demandé l’ouverture d’une enquête CHSCT en application de l’article 53 du décret 82-453 du 28 mai 1982.

Nous refusons l’instrumentalisation de la mort atroce de notre collègue à des fins de destruction des garanties statutaires et collectives ainsi que des libertés individuelles. Nous pensons qu’il faudrait au contraire les renforcer.

Espérons que la mort tragique de notre collègue puisse être un rappel salutaire à la puissance publique de ses propres obligations afin de sauvegarder, dans l’École de la République, les libertés de penser et d’enseigner, inséparables l’une de l’autre dans l’exercice de la liberté pédagogique individuelle.

Nul doute que notre collègue y était très profondément attaché. Nous nous inclinons devant sa mémoire.